L’étonnante histoire de Jean Tarbe
Certes il distillait depuis 1994, mais ne s’est décidé à vendre son armagnac qu’au printemps dernier. Il décroche le plus beau prix du concours des eaux-de-vie d’Eauze pour sa première sortie. Rencontre
Sous le chêne vieux de deux ou trois cents ans –plus personne ne sait son âge exact- devant la maison familiale de Labastide-d’Armagnac, Jean Tarbe sourit. Comme un gamin qui vient de jouer un joli tour. Faut dire que le sien n’est pas mal. Ecoutez plutôt : au printemps dernier, le Bas-Landais se décidait à mettre en bouteille un ou deux millésimes et à les commercialiser. Histoire de compenser un prix du maïs un peu à la peine et s’améliorer les fins de mois. Le viticulteur expédie deux échantillons pour le concours les Talents de l’armagnac, Le concours référence, celui qui, en outre, ouvre la porte du concours général agricole. Bingo ! Jean Tarbe ramène l’argent avec son millésime 1996, et l’or avec son 2000. Et ce n’est pas tout, ce même 2000 décroche le prix du Grand jury. Dit différemment, il est le meilleur…des meilleurs de ce concours.
Pas de quoi déstabiliser le Landais. Juste une petite fierté intérieure que l’on obtient en poussant le gaillard dans les cordes. « C’est vrai, cela fait plaisir. » Ses yeux traduisent une légitime fierté et un petit quelque chose de l’ordre de la revanche, sur lui, sur la vie qui n’a pas forcément toujours été marante. Il la tient sa récompense. Mieux, un point de départ. « Disons que cela m’encourage à poursuivre, lâche-t-il. J’ai des projets de nouvelle bouteille, d’étiquette. » L’aventure commence pour Jean Tarbe qui a succédé à son grand-père qui acheta le domaine en 1932 et à son père Hubert qui le fit évoluer.
Marthe, sa maman, vend toujours « son armagnac ». Quelques millésimes appréciés des gourmands de ces eaux-de-vie nées sur les sables fauves landais. Assise devant la cheminée, elle commente de loin la réussite de son fils. « Bien sûr que cela fait plaisir. Une chose est sûre, il n’a pas été pistonné parce que personne ne le connait. » La réflexion amuse son fils. Comme le fait que son 2000 ne soit pas « sorti » lors du dernier concours des eaux-de-vie du Bas-Armagnac landais. Quant aux raisons de son succès à Eauze fin novembre, il n’en trouve pas. Si ce n’est que son armagnac aussi marqué en entrée qu’en fin de bouche, offre une rondeur et des accents vanillés « qui visiblement ont séduit le jury. »
Un pur Baco qui pourrait changer la vie de Jean Tarbe, Armagnacais aussi attachant qu’atypique qui n’en revient pas « que les choses aillent si vite. » Un aveu ? Il ne serait pas mécontent que son 2000 (voire son 1996) décrochent une petite médaille à Paris. Pour poursuivre une belle histoire qui ne fait que débuter.